Rose Morte - Tome 3 : Flétrissures de Céline Landressie

Je suis une adepte des lectures qui emportent, fascinent et émeuvent. Celles qui en l'espace de quelques lignes, périphrases ou tournures littéraires me font voyager au travers des frontières et des époques. 
J'avais déjà eu un magistral coup de cœur pour les 2 premiers tomes de cette série, et j'attendais fébrilement le troisième, espérant encore et toujours plus de la part de ses héros, et j'ai été exaucée. Au delà de mes espérances. Flétrissures a été à la fois un révélateur, un choc et un coup de foudre. 

Nous voici plongés en 1943, et mon premier coup de cœur est arrivé dès les premières lignes. Un air de musique, des costumes parfaitement taillés, un chapeau distingué complétant à merveille un ensemble révélant la féminité absolue de Rose, des effluves de cigarettes s'échappant d'un porte-cigarettes augmentant encore l'atmosphère raffinée de la scène... Tout le cadre est posé. En quelques mots subtils et habilement placés, je sentais cette odeur de tabac, j'entendais le son crépitant du phonographe, et je me retrouvais projetée en pleine Seconde Guerre Mondiale.
(J'en profite d'ailleurs pour saluer à nouveau tout le travail de recherche effectué par Céline Landressie pour poser le décor et ancrer ses histoires dans une véracité éblouissante.)

Le deuxième choc est venu de ce décalage addictif causé par le tutoiement nouvellement instauré par certains des héros, qui ne dénature en rien le profond respect que chacun de ces quatre Arimath porte à ses congénères. C'est avec ce petit détail que ces héros se rapprochent encore plus du lecteur et de notre époque. Comme si ils étaient là, tout près de nous, aussi bien dans le temps que dans l'espace ou le langage verbal.

Ce troisième tome se déroule donc lors d'une période particulièrement sombre et meurtrière, où la folie humaine côtoie le fanatisme et le nazisme, où sont perpétrés crimes contre l'Humanité et génocides aveugles. Et c'est dans cette atmosphère glaciale et oppressante que nos quatre héros vont déjouer certains plans, tout en rendant encore plus complexe la trame de fond.
Et c'est dans cette même atmosphère que se sont révélés certains personnages à mes yeux.

Rose est toujours le symbole de ce raffinement, cette intelligence et de sensualité fine qui la caractérisent. Ses échanges avec Artus restent de purs délices, alternant piques et déclarations voilées. Leur amour reste à la fois fort et latent, impossible à vivre au grand jour, douloureux et beau, ce qui constitue l'apanage des plus grandes histoires.
Adelphe, mon très cher et tendre Adelphe, est fidèle à lui-même: doux, posé, taciturne et discret, mais néanmoins fort et déterminé. Ce personnage m'émeut profondément depuis le début, et il en est de même dans ce tome.

Cependant, la vraie révélation, le coup de cœur incroyable et inattendu de ce tome vient de Vassili. Jamais je n'aurais imaginé qu'un personnage puisse à ce point me troubler, me faire mal tout en forçant mon respect. Derrière ce voile de glace en lien étroit avec sa Russie natale se cache un prince presque désabusé et incompris, mais dont le sang bleu le pousse à ne rien dévoiler, ni même à en vouloir aux principaux responsables de ses blessures. Et lorsqu'il laisse la carapace se fissurer l'espace de quelques lignes, il en devient bouleversant et majestueux, comme le sont trop rarement certains héros.
Le chapitre 11 est en effet merveilleusement écrit, mais je garde personnellement en tête ces moments d'abandon de Vassili, qui constituent pour moi l'apogée de Flétrissures, le morceau de diamant caché parmi toutes ces pépites d'or que sont les phrases de Céline Landressie.

J'ai à nouveau vécu ma lecture à fleur de peau, et ai refermé ce troisième tome de la manière dont le laissait présager le titre: flétrie d'avoir trop été chamboulée, et de devoir à nouveau supporter la longue attente qui nous sépare du tome 4.

Bref, un troisième tome intense et prodigieux. Rares sont les livres qui arrivent encore à me surprendre et me poursuivre nuit et jour, mais Flétrissures figure parmi ceux-là. Il constitue la suite logique de cette série fabuleuse que je ne cesserai de défendre. Quelle que soit la qualité de la couverture.

Ma note: un merveilleux          / 5

 ,9/5